la petite histoire

shake it off
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Birdy - wings

Elle vient de claquer la porte et je me retrouve comme un con devant un appartement presque vide. Elle a tout emporté. Du moins tout ce qu'elle a acheté. Pour nous. Et elle a acheté pas mal de choses au final. Je regarde les restes de trois années passées ensembles. J'ai du mal à croire que notre mariage ait seulement tenu un an. On est mort aussi vite qu'on est né. Elle devait bien avoir ses raisons pour me dire que je travaillais trop et que je ne faisais plus attention à elle. Je revenais tard. Oui. J'bossais autant que je pouvais. Mais c'était ma place qui était en jeu... Elle était qu'une vendeuse dans une boutique de fringue. Elle comprenait pas. Tant pis. Devant moi s'éparpillaient les photos prises à de nombreuses années d'intervalle. Les souvenirs de toute une vie éparpillés sur le sol. Elle m'avait jeté à la figue un album. Elle disait qu'elle ne pouvait pas le garder. Qu'elle voulait refaire sa vie. Alors j'ai décidé de l'ouvrir, soupirant longuement en découvrant les portraits qui défilaient.

La première photo me fait sourire malgré ma tristesse. C'est moi. J'étais un gamin souriant à l'époque. J'ai sûrement perdu ça en grandissant. J'suis né à Helsinki, capitale de la Finlande il y a un peu plus de vingt-six ans. Ma mère était une femme tellement gentille, elle passait son temps à faire du bénévolat pour les sans-abris et les personnes qui vivaient dans la précarité. Mon père tenait une petite boulangerie dans le quartier le plus pauvre de la ville. On avait très peu d'argent mais mes parents rêvaient d'avoir un enfant depuis tellement d'années que j'ai été l'élu. Un enfant choyé comme le petit jésus. J'étais chanceux de vivre dans une famille comme celle-ci pleine d'amour, de tendresse et de compréhension. Ma mère me surprotégeait contre tout et n'importe quoi pourvu que je ne souffre jamais. Elle est celle qui m'a apprit à faire du vélo dans une petite route alors que mon père bossait dans sa boulangerie. J'étais souvent malade étant gosse et mes parents se sont rendus compte que j'avais un petit problème appelé « souffle au coeur ». Rien de grave mais je devais régulièrement me faire traiter pour éviter que celui-ci devienne de plus en plus mauvais. En attendant, j'ai passé pas mal de temps chez le médecin étant enfant alors aujourd'hui, j'aurais tendance à dire que moins je passe de temps chez le doc, mieux je me porte. Je souris à cette photo de moi et mes parents. Elle avait été prise pour mon premier jour d'école et j'avais ce cartable extrêmement moche mais que ma mère m'avait trouvé dans une petite boutique, elle en était tellement fière et ça lui brisait le cœur de me laisser partir à l'école. Son visage lorsqu'elle m'avait déposé. Je me souviendrais toute ma vie. Cette femme m'avait donné tout l'amour qu'elle avait en elle, mon père aussi, ne vous méprenez pas, mais elle restera toujours la seule et unique femme dans mon cœur à valoir le coup.

Je jette cette photo dans le feu de la cheminée et soupire longuement, j'ai pas parlé à mes parents depuis quelques temps, j'ai été occupé. Ils comprendront. Une autre photo. Moi. Avec mon diplôme d'université. Je me souviens de la remise des prix, j'avais été à une des meilleures écoles grâce à une bourse pour le mérite. C'est quand j'suis arrivé au collège que mes parents se sont rendus compte que j'étais un peu plus intelligent que les autres jeunes autour de moi, c'est aussi à ce moment que j'ai commencé à me renfermer. Je les voyais, tous ces mecs qui se prenaient pour les rois du monde et qui enchaînaient les nanas comme des mouchoirs, j'avais l'impression d'être de trop dans un monde que je comprenais pas. J'ai sauté trois classes. J'ai eu la chance de gagner cette fameuse bourse pour entrer dans l'université de mon choix, ils me voulaient et je me suis senti pour la première fois intrigué et intéressé. C'est là-bas que j'ai connu Irja, la jeune femme qui vient de me quitter. Elle était en train de réserver pour des examens lorsque je l'ai rencontrée, elle avait quelques années de plus que moi mais son regard et ses longs cheveux blonds m'avaient interpellé. J'expire longuement en me souvent de la jeune femme, du jour où je l'ai présentée à mes parents. Le regard de ma mère sur la jeune femme m'avait déçu. Elle ne l'appréciait pas, la trouvait hautaine et trop compliquée pour moi. J'aurais peut-être du l'écouter ce fameux jour. Tant pis, ça m'apprendra. Notre histoire avait avancé rapidement, nous étions amoureux et rapidement, nous avions eu la chance de s'entendre parfaitement. Au départ. Je croyais qu'elle était la bonne, sûrement la raison pour laquelle je lui ai proposé de me suivre à Phoenix pour trouver ce fameux job.

Dernière partie de l'album. Notre mariage. Elle portait cette magnifique robe bustier entièrement blanche, ses cheveux blonds attachés et ses grands yeux qui me fixaient. Elle était superbe. On venait d'arriver à Phoenix, on s'était mariés sur un coup de tête de peur de ne pas avoir la possibilité d’empreinter de l'argent à la banque ou d'acheter un appartement aux États-Unis. On a vécu un an ensemble, c'était intéressant. Elle était douce et gentille, une femme parfaite qui faisait attention à elle et qui profitait de sa vie comme je profitais de la mienne pour travailler. Ils m'avaient recruté directement à l'école, ils avaient besoin de quelqu'un de nouveau et j'avais attiré leur attention avec un projet inventif. Je soupirais longuement en jetant la photo au feu. Irja venait de partir et elle m'avait annoncé qu'elle avait trouvé un autre homme entre temps. Elle voulait sûrement avoir un enfant avant d'entrer dans ses trente ans. J'étais un carriériste peut-être... Ou juste incapable de rester avec quelqu'un d'autre. Mon coté réservé prenant trop de place pour elle. J'avais du mal à croire que je vivais dans ce vide entier. Mais tant pis. J'avais plus qu'à me reconstruire.