la petite histoire

Like I said this is not a story about forgiveness.

« Mais qu’est ce que t’as foutu ? » La voix de Maykana venait de me faire sortir de ma rêverie, tandis que je tirais machinalement sur ma cigarette. « Si tu pouvais éviter de venir me faire la morale à sept heure du matin je t’assure que ça m’arrangerait beaucoup. » Marmonnais-je avant de prendre appui sur mes coudes afin de lui faire face. Observant ma sœur pendant quelques secondes, j’haussais les épaules en soupirant. « Arrête avec ton regard de tueuse russe. » - « T’es pas rentré pendant trois jours je te rappelle. » - « Oui bah ça va, n’en fait pas tout un plat. » - « Et t’étais où ? » - « Chez Adam. Ça te va ? » Maugréais-je en me levant du lit avant de sortir sur le balcon. « Non ça ne me va pas et reste là, j’ai pas finis moi ! » - « Bah moi si, j’ai rien à raconter, désolée. » C’était la pure vérité, il n’y avait rien à dire mise à part peut être le séjour au commissariat, mais si je lui racontais ça, elle allait encore en faire une montagne. J’aimais ma sœur, c’était même un euphémisme, mais il y avait des choses que je ne pouvais pas lui raconter. Non pas parce qu’elle n’aurait pas compris, mais parce qu’elle n’aurait pas cautionné mes actes. Elle ne pouvait pas voir Adam en peinture et je la sentais bouillir à mes côtés, comme si elle allait me décocher un service de volleyeuse d’une minute à l’autre. « J’aime pas quand tu fais ça. » - « Tu as l’air d’oublier que je reviens toujours. » - « T’as intérêt. Parce que le jour où tu ne reviens pas, je te piste dans tout le pays et je t’enterre moi même. » - « Deal ? » Demandais-je avec un sourire narquois en lui tendant la main. C’était déjà bien compliqué de ne pas lui parler durant une seule petite journée, alors ne plus jamais revenir, c’était tout bonnement impensable. « Deal. » Acheva-t-elle en éclatant de rire avant de s’appuyer sur mon épaule avec une mine boudeuse. « Je ne rigole pas, je t’achèverai et t’enterrerai de mes propres mains. » - « Ah mais ça, je n’en doute pas. »

« Laisse tomber Adam. Et regarde la route, tu vas finir par nous tuer. » Grognais-je en repoussant le visage du jeune homme avec mon index. Cela faisait presque une demi heure qu’il roulait sans décolérer comme si je venais de faire la plus grosse bêtise de ma vie. Je ne savais pas pourquoi il continuait inlassablement ses petites scènes de jalousie tandis que lui s’envoyait allègrement les premières venues. C’était l’hôpital qui se moquait de la charité avec ce garçon. « Je ne veux plus que tu le vois. Jamais. J’suis clair là ? » - « Oh ferme là. » Marmonnais-je en collant mon front brûlant contre la vitre. « Va moins vite tu vas vraiment nous faire finir dans le décor. » Le jeune homme secoua la tête d’un air résigné, tournant la tête il fit la moue quelques secondes. « C’est mon genre de ne pas rouler comme un di.. » Soudain, ce fut le drame. Quelque chose heurta l’Infinity, Adam venait de braquer autant que possible et ce qui devait arriver arriva. L’arbre. L’air bag. Puis le trou noir. Je ne savais pas exactement combien de temps c’était écoulé depuis cet accident, mais ce fut Adam qui me sortit de la voiture, totalement paniqué. « KAHENA ! Kahena ça va ? » Peinant à sortir du 4x4 totalement cabossé, j’opinais du chef avant de me laisser tomber dans ses bras. Une chose était sûre, j’avais quelque chose de cassé. « Il faut qu’on parte d’ici ! » - « Quoi ? Mais.. Mais ta voiture, elle est.. Tu vois bien.. » Balbutiais-je en prenant appui contre un arbre. « Putain Kahena tu veux bien m’écouter une fois dans ta vie ? Il faut qu’on se barre ! » Cria-t-il en me secouant comme un prunier. À ce moment là, une masse sur la route attira mon attention. Boitillant tant bien que mal autour de la voiture, je distinguais un corps bien amoché. « ADAM ! » - « Arrête de gueuler bordel. » Grogna le jeune homme en passant une main dans ses cheveux tout en faisant les cent pas. « C’est.. C’est toi qui l’as renversée ? » - « Je t’ai dis de te taire ! » Son regard était celui d’un véritable fou furieux et je sentais la peur m’envahir de plus en plus. La prison, ce n’était vraiment pas mon truc et je n’avais aucune envie d’y finir pour un acte que je n’avais pas commis. Pourtant, ce n’était pas tout à fait ce qui allait nous arriver. En moins de temps qu’il ne fallut pour le dire, il me saisissait par le bras avant de se mettre à courir en direction de la forêt environnante. À cet instant précis, je sentis que j’étais dans la merde.

Assise sur une de mes valises au beau milieu de l’aéroport de New York, je pianotais machinalement sur ma pochette d’ordinateur tout en observant les passants. Je ne savais absolument pas ce que j’étais en train de faire et encore moins ce que ça allait donner. Cela faisait quasiment trois ans que je n’étais pas rentré à la maison et je devais avouer que cela me rendait très nerveuse. D’une part parce que j’avais vécu énormément de chose en ce laps de temps, d’autre part parce que finalement, personne n’avait vraiment eu l’air de se soucier de mon absence. Même pas ma jumelle. Je ne sais pas, dans ce genre de cas il y a des photos sur les bouteilles de lait, des appels à témoins et tout ce genre de chose, mais pas pour moi. Après tout, ça devait avoir arrangé toute la petite famille. Toujours est-il que je ne savais absolument pas comment j’allais m’expliquer et surtout comment les retrouvailles allaient se passer. Étrangement j’étais plutôt en colère et vexée mais ce n’était pas mes ressentis qui devaient passer en premier. Après toute cette affaire avec Adam, j’avais beaucoup grandi (par obligation, je me devais de l’avouer) et quelque chose me disait que la relation familiale allait être très compliquée. L’appel de l’hôtesse de l’air me fit sortit de ma rêverie et ce fut douloureusement que je prenais mon courage à deux mains. Il y avait quelque d’étrange, de changé et je le savais pertinemment. Une chose était sûre : je n’étais pas spécialement prête à rentrer, mais je n’avais plus vraiment le choix.