Seuls les enfants savent aimer en silence et se trouvent comblés

Et discrètement, il se glisse sans bruit dans le grand appartement standing du dernier étage de l’immeuble. Le seul disposant d’une terrasse assez grande pour y installer une pièce d’eau, une table d’extérieur et une balancelle tout en offrant une impression de véritable petit jardin par les fleurs, plantes et autres verdures installées là. La vue est splendide de là-haut, il est si agréable de déjeuner là les matins d’été. Dehors il fait encore noir, il doit être quatre heures, plus ou moins. Cela ne lui arrive pas souvent de rentrer si tard, mais il y a des exceptions à tout. Cette fois-ci, il n’avait pas réussi à se débarrasser de la jeune femme plus tôt, toujours la même histoire, dans leur sommeil elles s’accrochent et quand à peine il se redresse pour quitter le lit, elles se réveillent, comme si leur instinct les avertissait. Toujours les mêmes questions. Tu pars ? Reste un peu… S’il te plaît ? Pourquoi ne veux-tu jamais rester dormir ? Toujours les mêmes réponses. Responsabilité, travail, rendez-vous. Et il embrasse le front de la belle avant de partir. On ne discute pas avec Alistair, cela le fait partir encore plus vite. A noter que cette nuit, la femme aura été un peu trop insistante et déterminée. Il ne la reverra pas, tout simplement. Refermant la porte d’entrée, il pose ses clés délicatement dans le saladier, suspend sa veste, enlève ses chaussures pour les ranger dans un coin puis file dans la salle de bains pour prendre une douche rapide. Après avoir vérifié que personne n’est réveillé, il va dans sa chambre et s’écroule dans son lit. Sept heures trente. Pas de réveil qui sonne, non. La porte s’ouvre sur un petit bruit de poignée, il l’entend mais ne bouge pas d’un poil, se retournant même dans son lit pour cacher le petit sourire sur ses lèvres. À moitié réveillé, il sent le matelas s’enfoncer à côté de lui, il la sent se pencher sur lui, déposer un baiser sur sa joue. « Debout le prince au bois dormant » Pour l’ennuyer, il grogne, l’air de ne pas vouloir être dérangé. Mais elle n’en a pas fini avec lui. Elle se lève, debout sur le lit, ses petits poings sur les hanches. « Allez ! Debout ! » Il ne grogne plus, ne fait plus aucun bruit et retient sa respiration. Elle s’inquiète, et penche sur lui. « Papa ? » Alors là seulement il se retourne, sans prévenir il l’attrape alors qu’elle crie de surprise et de ravissement, elle tombe sur lui et elle gazouille alors qu’Alistair referme ses bras sur elle et embrasse sa joue d’un gros smack. « Arrêête ! » À son tour, il rit en la voyant se débattre, il la lâche et elle s’assoit à califourchon sur son torse. Il frotte ses yeux, cherche à se réveiller, la nuit a été courte. Puis il regarde la petite. Rosalie, quatre ans, une princesse aux longs cheveux noirs et aux yeux noisette. Elle n’aura pas pris grand-chose de sa mère, si ce n’est que le nez, ce petit nez en trompette qui lui donne cet air de petit lutin, comme Grâce. Sa Rose. Oh, elle aura pris son caractère, enfin, certains aspects. Mais physiquement, elle tient beaucoup de lui. La réalité du gène dominant. Grâce était blonde aux yeux bleus. Il aura finalement dominé en tout, ou presque. Parfois il surprend Rose à regarder la photo de sa mère en tenant un miroir. Elle cherche la ressemble, il le sait. À défaut de l’avoir connu, elle cherche à lui ressembler. Il faut toujours qu’il lui rappelle qu’elle a son nez, et son menton délicat. Elle en sort toujours fière et ravie. Il attrape une mèche de ses longs cheveux en pagaille. « Il va falloir démêler tout ça. » Les yeux de la fillette brillent de plaisir, et elle hoche solennellement la tête. « Allez, descend de là que je puisse me lever » Et toute sautillante elle descend du lit pour courir jusqu’à la salle de bains en riant. Après s’être étiré, il la suit, saluant Nora dans la cuisine qui prépare le petit déjeuner et les tartines de la demoiselle. Il passera dix minutes à coiffer les cheveux de sa fille, en lui faisant une tresse qui retombe dans son dos. Il se préparera pendant qu’elle déjeune et la rejoindra pour avaler son café. Ensuite il l’amènera à l’école et lui retournera au bureau, plancher sur le dossier de son prochain client. Le rituel de chaque jour, une routine dans laquelle il se complaît, la seule peut-être, qu’il ne veut pas voir changer.